Stéphane Lhuillier, Hiccopampe - Coaching for Family - Paris 5

View Original

Et si nous parlions du sujet épineux des ados & les écrans / média sociaux

(Enfin quand je dis “nous”, je devrais plutôt dire “je” … à moins que vous ne me laissiez des commentaires je serai la seule à parler sur cette page)

Quel parent ne bataille pas avec avec son ado sur le sujet des écrans / téléphone / jeux vidéos / réseaux sociaux ? Entre parents, nous en parlons beaucoup, on se plaint, on compare les utilisations que nos ados en font et on s’échange nos trucs et astuces parce que c’est un vrai sujet de friction avec votre ado.

Il y a la team pour et la team contre. Personnellement moi je suis de la team du milieu, la team “ça dépend” (avec le fameux ça dépend ça dépasse), cela dépend des parents, cela dépend des enfants, en revanche bien sûr qu’il y a des points de vigilance à avoir.

Vous dire que j’ai résolu ce problème des écrans à la maison serait totalement faux (ben oui je suis une maman normal quoi !). Mais c’est un sujet qui me tient à coeur, sur lequel je me suis formée et sur lequel je lis et sur lequel je sais que je suis assez intransigeante avec mes enfants. Du coup cela devient un sujet de disputes récurrentes - oui je sais c’est mal ! -.

Je vais juste mettre un warning pour cet article : je n’y aborde volontairement pas le sujet de l’addiction aux écrans qui existe et est préoccupant. Il s’agit d’une maladie et je ne suis pas habilitée à parler d’addiction qui nécessite une prise en charge médicale.

Alors pourquoi j’écris cet article ?

Et bien parce que oui je n’ai pas trouvé la solution (en l’occurrence il n’y a jamais une seule solution, il y a toujours plusieurs possibilités et elles sont toutes OK), en revanche il y a quelques pistes à explorer et à partager.

L’idée n’est pas dans mes articles que je vous dise quoi faire. Je ne suis pas partisane de m’imposer comme celle qui sait tout car non je ne sais pas toujours et en plus je peux me tromper. En revanche, je vous livre ce que j’ai mis en place à la maison et ce que j’ai fait avec mes jeunes coachés. J’espère que cela vous invite à réfléchir au sujet, que cela peut vous apporter un autre point de vue et que ces articles vous déculpabilisent en vous donnant le droit de vous planter.

Et même avec la meilleure volonté du monde, il y aura toujours un cheval de bataille avec votre ado (cela peut-être les écrans, mais il y a tellement d’autres sujets sur lesquels il peut y avoir de la friction.) : votre ado est en pleine recherche identitaire et en pleine construction, il a besoin de trouver ses propres valeurs, sa propre personnalité et quoi de mieux pour ce faire que de s’opposer à ceux qui nous aime inconditionnellement - nos parents.

Les écrans, médias sociaux et téléphones : des outils à notre service

Pour moi, aider votre adolescent à gérer les médias sociaux et la technologie est essentiel. Il s’agit de favoriser un usage responsable et équilibré de ces outils, parce que oui ce sont des outils et comme tout outil on apprend à les utiliser à bon escient. Quand vous avez eu un marteau dans la main pour la première fois, on vous a expliqué à quoi cela servait (planter des clous, même si parfois cela peut aussi être utiliser pour casser quelque chose), comment l’utiliser (on le tient par le manche et pas n’importe comment histoire de conserver tous ses doigts en bon état) et les dangers d’une mauvaise utilisation du marteau (un coup de marteau sur les doigts ça fait mal, un coup de marteau sur la tête peut faire pas mal de dégâts donc non on ne tape pas son petit frère avec un marteau même s’il nous a trop énervé parce qu’il a pris le dernier gâteau dans la boîte et qu’il était pour nous), en bref vous avez donné des règles et des usages.

Vous me voyez venir avec mes gros sabots ? L’avez-vous fait avec les technologies et les téléphones ?

Les écrans, médias sociaux et téléphones : au coeur de notre quotidien

L’idée n’est pas de diaboliser les écrans, les médias sociaux et la technologie. Tout cela fait partie de nos vies, et est aujourd’hui indispensable. Soyons lucides sur ce point, notre téléphone ne nous sert plus seulement à téléphoner mais aussi à prendre des photos, à nous informer, à lire, à checker nos emails, à regarder la météo, à écouter de la musique, à nous déplacer … Ils nous servent également à créer du lien social, à faire partie d’un groupe. En revanche ce sont des outils et en tant que tels il faut apprendre à s’en servir. Nous (les parents) n’avons pas grandi avec, ils sont apparus quand nous étions enfants / ados / jeunes adultes (rayez la mention inutile en fonction de votre année de naissance). Personnellement j’ai connu les tam-tams, les cassettes qu’on rembobinent avec un crayon, les VHS, les mini-disc, etc (et les dinosaures aussi d’après mes enfants mais là c’est une autre histoire). Donc j’ai appris au fur et à mesure à utiliser ces instruments qui ont évolué tant dans leur design que dans les possibilités qu’ils offrent. J’ai aussi appris à ne pas en être tributaire (j’énerve mes proches parce que régulièrement mon portable est au fond de mon sac et je ne réponds pas aux appels ou aux messages - et je m’octroie ce droit !).

Nos enfants sont nés avec, certains disent même qu’il s’agit d’une extension de leurs personnes, que le téléphone est greffé à leur main. En vrai ils ne sont pas vraiment nés avec, on leur a mis (car oui c’est nous les parents qui l’avons fait) ces technologie dans les mains plus ou moins tôt (quel parent n’a pas dégainé son téléphone au restau pour pouvoir avoir un peu de calme en attendant les plats ? OK vous faites peut-être partie des rares qui ne l’ont pas fait mais moi je plaide coupable !). Mais leur a-t-on expliqué comment l’utiliser ou ce qu’on attendait d’eux en termes d’utilisation ? Pas toujours …

Et si on en venait au fait ?

Les écrans, médias sociaux et téléphones : vigilance & prévention

Alors la première chose à faire est d’ouvrir la discussion sur le sujet - vous pouvez le faire avant même qu’il n’ait un téléphone. Car même sans avoir de téléphone à lui, il côtoie des personnes avec et observe. Ayez une discussion franche et honnête avec votre enfant ou votre ado concernant les médias sociaux et la technologie. Discutez de leurs utilisations, des avantages et des risques, de ce que cela implique et bien sûr rappelez que s’il y a le moindre problème vous êtes là. Vous pouvez trouver des livres qui en parle, des sites et il y a même une mini-série d’arte sur le sujet “Dopamine”.

See this content in the original post

Apprenez leur la vigilance et éduquez-le sur la sécurité en ligne. Il y a quelques règles basiques à appliquer pour se protéger : protéger sa vie privée en ligne, utiliser des mots de passe forts, être prudent (donc on ne partage pas d’informations personnelles et on n’accepte pas n’importe qui comme ami) et apprenez-lui à reconnaître les arnaques en ligne. En fait, ces règles basiques sont vraies pour tout le monde quel que soit l’âge.

N’oubliez pas, pour les médias sociaux et les écrans : le produit c’est nous

Et faites-leur prendre conscience des implications à long terme. Il y a des implications pour eux mais aussi des implications pour ceux avec qui ils interagissent. Expliquez à votre enfant qu’en fait le produit c’est lui. C’est un peu trash dit comme ça mais c’est vrai. Il faut juste lui faire comprendre que sa navigation internet permet aux entreprises de proposer des produits / contenus qui lui correspondent. Que le temps qu’il passe en ligne, que les vidéos ou photos qu’il commente ou like sont autant d’informations données sur lui aux différents algorythmes qui poussent d’autres contenus pour le faire rester plus longtemps. Ces données vont être monétisées et servir aux différentes entreprises après pour leurs proposer du contenu qui est susceptible de leur plaire et du coup leur faire passer plus de temps sur leur réseau social préféré / jeu préféré ... Cela s’appelle du marketing :-) C’est le fameux « Ce que nous vendons à Coca-Cola, c'est du temps de cerveau humain disponible » du P. Le Lay (qui avait fait un tollé à l’époque). C’est encore vrai sauf qu’aujourd’hui ce n’est plus TF1 mais les GAFA qui vendent ces données et les utilisent aussi pour elles.

Je simplifie et c’est même peut-être simpliste comme explication mais l’idée est là et je suis sûre que vous l’avez comprise.

Vous pouvez aussi rappeler à votre ado que ce qu’il partage en ligne y reste. Donc dans 10 ans quand il cherchera un travail, sa photo de soirée avec ses potes peut ressortir et certains recruteurs en tiendront compte. Donc non on ne poste pas n’importe quoi, on ne met pas son profil en public et la vigilance est de mise. Il peut y avoir des conséquences à long terme, notamment sur leur réputation personnelle et leur avenir professionnel.

Les écrans, médias sociaux et téléphones : fixez des règles

Et oui cela passe aussi par la fixation de règles et de limites claires pour l'utilisation des media sociaux et des appareils électroniques. Cela peut-être des horaires d'utilisation, un temps quotidien, des sites autorisés Vs interdits mais aussi des zones ou moments interdits de téléphone, pas de chargeur de téléphone dans la chambre, le mode avion pendant les devoirs - exemples : le moment du dîner, la chambre au moment du coucher, les toilettes, pas de téléphone le matin, pas de téléphone 1h avant de se coucher. C’est à vous de les fixer et de les faire respecter (je n’ai pas dit que c’était facile). Si l’ado est suffisamment grands, ces règles peuvent être discutées ensemble et définies ensemble (certaines règles néanmoins ne seront pas négociables, il faut que vous soyez au clair avec ce qui est important et pour les règles non négociables expliquer pourquoi vous imposez cette règle).

Votre meilleur ami : les outils de contrôle parental - oui alors là c’est quand ils marchent.

Là je vais vous partager mon expérience personnelle : avec Numéro1 le contrôle parental a marché, c’était merveilleux, Youpi - Numéro2 a réussi à contourner tous les contrôles parentaux qu’on avait mis du coup on lui a coupé le wifi et pris un forfait sans Internet (oui pas cool, le moyen est un peu radical mais je vous avais dit : je ne suis pas parfaite et je n’ai pas trouvé la solution magique pour que mon ado ait un comportement exemplaire en matière de media sociaux). Et puis j’ai acheté une sorte de boîte coffre fort pour mettre le téléphone et qu’il ne soit plus accessible. Le problème de cette boîte c’est qu’elle fonctionne avec un timer et ne s’ouvre qu’à la fin du décompte - Et quand on programme 10 jours au lieu de 10j cela pose un petit problème … et j’ai utilisé tournevis et marteau pour ouvrir cette fameuse boîte ! Bref pas une solution idéale mais ubne solution quand même.

Pour revenir au contrôle parental, normalement, ces logiciels permettent de surveiller et limiter l'accès aux contenus inappropriés, ils peuvent également aider à définir des limites de temps d'écran (Alors ça c’est en théorie parce que dans la pratique moi j’ai un taux de réussite de 50% ce qui n’est pas si mal).

La Gestion des écrans : la démonstration par l’exemple

Soyez un modèle pour votre adolescent en utilisant vous-même les médias sociaux et la technologie de manière responsable - être un modèle ce n’est pas être parfait non plus, mais interrogez-vous sur votre propre utilisation des écrans et des media sociaux. Il vous sera plus difficile de leur demander de lâcher leur téléphone pendant le dîner si vous même l’avez dans les mains et checkez vos e-mails ou regardez les news. Montrez-leur comment vous gérez votre propre temps d'écran. Vous pouvez aussi leur conseiller de supprimer les notifications (ça enlève les tentations) ou de regarder chaque jour combien de temps ils ont passé sur leur téléphone et à quoi (les téléphones donnent ces informations assez facilement et donnent le temps passé ainsi que la répartition dans l’usage).

Cela dit le meilleur outil est qu’ils prennent conscience de leur usage. J’avais un client (jeune adulte) qui était passé au téléphone à clapet pour éviter toute tentation car sa consommation était trop importante. Un autre de mes clients (ado) s’était aperçu que sa consommation de Youtube était trop importante (et qu’il regardait Youtube plutôt que d’apprendre ses leçons) et auquel j’avais conseillé de mettre un timer pour limiter sa navigation sur Youtube - conseil qu’il avait appliqué et qui lui convenait.

L’idée est d’encourager l'équilibre. Il faut une balance entre la vie et les activités en ligne et celles dans la “vraie” vie avec des interactions sociales. Soulignez aussi l’importance de conserver des interactions sociales, des activités en personne (repensez au confinement et aux répercussions que le manque de liens sociaux ont eu sur les ados), le sport, la lecture et d'autres intérêts qui n'impliquent pas d'écrans. Bref tout est affaire de dosage.

intéressez-vous

Familiarisez-vous avec les applications, les jeux vidéos et les sites web que votre adolescent utilise. Discutez de ses choix et vérifiez si ces plateformes sont appropriées pour son âge. Vous pouvez même voir avec lui ce qu’il veut en faire, comment il les utilise et ce qu’ils poste quand il s’agit de réseau social… En fait vous surveillez (mais sans flicker).

Vous pouvez aussi aborder des sujets comme l'image corporelle (avec le bodyshaming qui existe sur les réseaux sociaux notamment) et de la cyberintimidation. Encouragez-les à parler si cela les concerne ou s'ils sont témoins de comportements inappropriés en ligne. A partir du moment où on met quelque chose en ligne, il y a des réactions - bonnes et mauvaises, gentilles et méchantes, acceptables et inacceptables - et cela peut faire mal, très mal et avoir une vraie incidence sur la santé mentale et sur son estime de soi.

écoutez-le, discutez, partagez

Apprenez à votre adolescent à évaluer de manière critique l'information en ligne, à remettre en question les sources d'information (oui tout n’est pas vrai, il y a des sites plus ou moins sérieux, des hoax, des informations qui circulent et qui n’ont aucun fondement …) et à développer leur esprit critique. Il faut faire le tri dans tout ce qui est en ligne, se dire que les personnes qui postent choisissent ce qu’elles postent, donc il y a du travail éditorial derrière, ou en tous cas le choix de mettre en ligne certaines choses - un peu comme quand vous allez voir un film : il y a le film monté et que vous avez sous les yeux, mais en fait il y a tous les rushs du films, tous les ratés, toutes les répétitions avant, tout le travail des costumiers, maquilleurs, coiffeurs, des éclairagistes, des ingénieurs du son, toute la mise en scène. Bref ce que vous voyez à l’écran est le résultat d’un travail beaucoup plus grand qui comprend aussi des loupés, des chutes, des fous rires qui ont été vécus mais que vous ne verrez jamais (ou plus rarement).

Respectez la vie privée de votre adolescent, tout en restant conscient des risques potentiels. Discutez des paramètres de confidentialité et de ce qu'ils devraient garder privé en ligne. Vous n’êtes pas loin, vous surveillez mais vous n’êtes pas derrière. Et si quelque chose les inquiète, prenez-le au sérieux et écoutez-le.

Il existe des ressources en ligne et des ateliers sur la gestion des médias sociaux et de la technologie pour les adolescents et leurs parents, renseignez-vous !


En aidant votre adolescent à développer une utilisation saine et responsable des médias sociaux et de la technologie, vous les préparez à naviguer dans le monde numérique de manière éclairée et équilibrée. Et gardez à l’esprit que son téléphone c’est un peu son doudou, il lui permet de rester connecté à ses différentes sphères (amicales, familiales, professionnelles …) et de faire partie d’un groupe.

Ces quelques pistes vous aideront je l’espère. Dans tous les cas, prenez le temps de donner le mode d’emploi à vos enfants avec les effets secondaires et les contre-indications. Cela ne se fait pas en une seule fois, et parfois il faut des piqûres de rappel, il y aura d’autres disputes, d’autres discussions, alors ne désespérez pas et allez-y par étape.

Peut-être avez-vous une autre expérience et des astuces à partager, n’hésitez pas à les mettre en commentaire ou à me contacter.

.

.
.

PS : petit bonus la chronique de Sonia Lupien, spécialiste en neurosciences. Elle y parle de la relation des ados et de leurs cellulaires, notamment dans le milieu du travail. Cette chronique est très intéressante et bourrée d’humour (avec en plus l’accent canadien que perso j’adore).